Les rêves, une source d’inspiration


C’est grâce à la littérature que je me suis intéressée aux récits de rêves à la fois sur le fond comme source d’inspiration, proche du surréalisme et du fantastique, et sur la forme en tant qu’écriture poétique.

j’ai, en lisant ces récits, pris conscience de la  portée symbolique  des rêves et de leur charge émotionnelle. Au-delà du travail d’interprétation, l’écriture onirique touche au plus près de l’individu et de son  âme, lui conférant une valeur universelle.

Lire des récits de rêve nous permet de revenir à la source d’un être et de saisir son style le plus personnel. Cela peut aussi nous inciter à consigner nos propres rêves dans un souci de meilleure connaissance de soi et d’accroissement de son imaginaire.

 

Je voudrais évoquer ici deux œuvres littéraires qui  sont en quelque sorte à l’origine de mon intérêt pour l’écriture onirique.

Ces deux livres appartiennent à des genres très différents, recueil de rêves d’un côté consignés et écrits par la française Marguerite Yourcenar et roman pour l’autre de l’écrivain israélien, Aharon Appelfeld.

Marguerite Yourcenar et ses Songes

Marguerite Yourcenar a écrit les Songes et les Sorts,  paru en 1938. Elle y consigne 22 rêves, formés entre ses 28 et 33 ans, nous offrant ainsi une entrée inédite dans son univers personnel, peuplé de personnages fantasmés ou réels parfois, de contenus et de sensations tour à tour angoissés ou émerveillés.

Si elle a réellement rêvé toutes ces images, elle a choisi de procéder au réveil  à un travail d’écriture précise et détaillée afin de rendre compte de ce qui l’a éblouie ou interpellée durant la nuit.

Son inspiration s’ est nourrie des images nocturnes et du  flux de sensations associées.

Le travail littéraire vient sublimer cette source par une réécriture qui ne cherche pas à donner du sens ou de la cohérence à son récit.

 

Il n’y a aucune tentative d’interprétation dans ces écrits. Cette production littéraire nous touche par son mystère et sa poésie et laisse émaner une facette singulière de l’écrivain.

 

On peut entendre que nos rêves constituent la part la plus authentique et la plus riche de notre âme, la lecture des Songes et des Sorts vient brillamment illustrer cette idée.

Les rêves souvenirs d’Aharon Appelfeld

Le second écrivain est Aharon Appelfeld, décédé très récemment,  le 4 janvier 2018 et il évoque particulièrement le monde des rêves dans son roman « Le garçon qui voulait dormir ».

 

L’auteur y relate l’histoire (pour une grande part autobiographique), d’un jeune homme et de la reconstruction de sa vie après  la seconde guerre mondiale. Durant la première partie du roman, il se réfugie dans le sommeil pour échapper à la réalité éprouvante de ses années de fuite suivies de l’exode avec d’autres rescapés à travers l’Europe.

 

Son sommeil est perçu comme sacré par les adultes qui l’entourent et s’occupent de lui. Ils le portent précautionneusement  durant leurs déplacements afin de protéger son état de dormeur.

Durant son sommeil, le jeune héros fait des songes. Il voit en rêve ses parents, sa famille, tués par les nazis, qui  lui parlent et lui prodiguent conseils et injonctions de ne pas les trahir  ni d’oublier ses racines.

Ici, le récit des rêves est rédigé dans un style simple, presque naïf, sous la forme de dialogues avec les apparitions nocturnes. Peu de détails ou de figures de style.

Les rêves sont intégrés au roman de façon fluide et naturelle, nous laissant entendre que les mondes conscients et inconscient dialoguent librement chez Aharon Appelfeld.

Le travail du rêve :

Le rêve est ici thérapeutique dans la mesure où il permet de se reconnecter au monde lointain de l’enfance, à un paradis perdu  d’où le rêveur puise des forces nouvelles et une énergie qui lui permettront d’affronter le réel et de s’y faire une place.

 

Selon Carl G. Jung, l’homme se développe par mouvements alternés de poussée transcendantale et de périodes de régression. Ces périodes de régression sont fondamentales pour évoluer et se connecter à ses forces vives, issues pour une bonne part de l’inconscient.

 Le héros du roman d’Appelfeld semble figé dans le sommeil afin de recontacter son énergie vitale en dialoguant avec l’univers merveilleux de son enfance.

Les adultes autour de lui, de façon intuitive, semblent comprendre ce besoin et le respecter.

 


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